« Over the rainbow ».

30 avril 2013


Je lisais voici quelques jours un débat sur le rainbowflag. Drapeau qui marquait aux yeux de certains la différence alors même que, 48 heures auparavant, était adoptée une loi réduisant les discriminations et donc les différences de traitement des enfants de France. C’est vrai,

ce symbole est ostensiblement « distinguant » donc « clivant  » pour quelques uns. A cela, les propos tenus sur Facebook préfèrent revendiquer le droit à la légitime indifférence que la nouvelle loi sur le mariage et l’adoption permettra davantage et mieux… après avis du conseil constitutionnel (ne l’oublions pas) et promulgation de la loi. Avoir les mêmes droits, les mêmes devoirs… C’est la quête de l’immense majorité d’entre nous.

Sont encore légion les clichés que nous trimbalons et qui associent à la majeure partie des gays la finesse et le raffinement, et à moultes lesbiennes des allures de « tontons camions ». Néanmoins, les projecteurs braqués sur nous depuis 6 mois ont permis de lever un peu le voile sur notre réalité. Nous ne nous ressemblons pas et pour beaucoup d’entre nous, et plus particulièrement les plus jeunes, nous avons des aspirations d’une banalité confondante. Aucune critique ne se cache dans mes propos. Juste une traduction des faits. Par banalité, j’entends ici des élans, des désirs, des souhaits de vie très similaires à ceux des autres. Les Straights.

Pour autant n’oublions CE qui nous a permis d’arriver là. A un début de victoire sur l’obscurantisme, le repli sur soi, le manque de générosité, de fraternité. N’oublions pas CELLES ET CEUX qui par leur action passée, nous donnent aujourd’hui l’occasion de raconter une autre histoire sans doute à nos suivants. Tou.te.s qui nous ont précédé, n’avaient pas d’autres choix que de passer par l’étape de la revendication à la différence. Et de brandir toute la variété des signes les plus ostentatoires de cette différence. De leurs différences. Pour réclamer le respect de leur singularité. Quitte à choisir l’exagération. A mettre des couleurs vives dans un monde gris et fermé. Ils devaient relever la tête et crier leur fierté, parce que trop nombreux étaient ceux qui voulaient les laisser dans la honte. Sans oublier les autres qui étaient prêts à les rouer de coups ou les tuer pour maintenir leur joug.

Alors Oui, la marche vers l’égalité nous permet aujourd’hui de nous interroger sur l’usage, l’utilité voire l’obsolescence des symboles de la distinction, des emblèmes d’une certaine appartenance. Peut-être, sans doute même, les droits et devoirs (pas encore…) identiques nous donneront-ils l’occasion de nous poser la question de l’existence et de la survivance de l’esprit communautariste. Et ce d’autant plus facilement pour les plus méfiants d’entre nous qui envisagent, à tout le moins avec suspicion ces regroupements uniformes, avec leur quête de l’identique. Souvent par confort, fût-ce par sécurité. Défiance, d’abord et avant tout parce que cette attitude revient à rejeter l’altérité et parce que cette représentation renvoie à l’idée de ghetto. Quitte à prendre le risque in fine de ressembler à ces agresseurs dont nous dénonçons les pratiques de rejet.

Le #mariagepourtous est l’opposé du « vivre entre soi ». La revendication portée avec talent et fougue par C. Taubira qui est devenue aux yeux de tous la championne de la lutte contre les discriminations ne peut venir percuter ces réflexes identitaires, de l’intolérance et du modèle dominant. Le « faire famille » tant attendu, et qui pourrait voir enfin le jour, ne peut et ne doit aujourd’hui rimer avec des réflexes qui nous conduiraient à revenir aux repères qui furent les nôtres par nécessité. De survie d’abord, puis de commodité ensuite.

Même si c’est difficile, même avec des séquelles vivaces, nous nous devons d’être exemplaires et ne pas singer ceux qui nous vomissent, en reproduisant l’exclusion fût-ce derrière ce symbole. Il n’est plus indispensable de nous cantonner exclusivement « over the rainbow ». Le conserver comme marque de notre route, comme mémoire commune est tout à la fois raisonnée et un acte affectif. Mais il en va de notre fierté d’assumer notre désir affirmé fort et clair d’appartenir à la même communauté, celle du peuple de France et par là même de nous retrouver derrière le seul symbole qui en fait son honneur, le drapeau tricolore. En ne reniant pas toutes nos différences.

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